La chancelière Angela Merkel a réussi à répondre à 16 participants lors du Forum des lecteurs à Stralsund (Mecklembourg-Poméranie occidentale). Les questions de tous ceux qui n’ont pas pu s’exprimer ont été récoltées afin que la chancelière puisse y répondre par écrit. Mme Merkel n’était pas à court de réponses, même si certaines questions portaient sur l’avenir, y compris le sien.

Politique en matière de réfugiés

« Le sauvetage en mer est un devoir humanitaire », a déclaré Mme Merkel. La Bundeswehr a également soutenu les gardes-côtes libyens dans le cadre de la mission militaire « Sophia ». Ceux qui traversent la Méditerranée ne sont pas tous les plus pauvres et les plus faibles. « Notre objectif doit être de parler avec les pays africains : Où pouvons-nous aider ? Comment pouvons-nous aider, et non pas soutenir le commerce des passeurs ? » La situation actuelle n’est pas satisfaisante, a reconnu la chancelière. Cependant, « nous faisons partie de ce monde, et notre bien-être est inséparable de celui des autres. »

Comment gérer les fausses nouvelles (« fake news ») ?
Mme Merkel s’est dite préoccupée par le mélange des faits et des sentiments. On peut facilement extraire des données de statistiques afin de vérifier des faits, par exemple. Cela n’est pas possible avec les sentiments. « Je m’inquiète qu’aujourd’hui, les sentiments sont souvent placés au-dessus des faits », a-t-elle reconnu.

Greta Thunberg

« Une fille hors du commun qui a mis beaucoup de choses en branle. Je la prends très au sérieux. »

Que faire face au réchauffement climatique ?

« J’ai été ministre de l’Environnement de 1994 à 1998. Nous avons négocié le protocole de Kyoto à Berlin, mais de nombreux pays ne l’ont pas ratifié. Puis, en 2015, il y a eu l’Accord de Paris sur le climat, dont les États-Unis se sont maintenant retirés. » L’Allemagne doit jouer un rôle de pionnière, sans quoi elle ne sera pas en mesure de convaincre d’autres pays de s’engager sur la voie de la lutte contre le réchauffement climatique.
« Nous devrions réfléchir à comment concevoir notre vie comme s’inscrivant dans un cycle, comme le font les propriétaires forestiers, par exemple. » Ceux qui viendront « après nous » doivent aussi avoir assez pour vivre. Sentir que l’on a « laissé quelque chose aux autres » peut être apaisant, selon Mme Merkel. Ici, les technologies modernes peuvent être utiles, a-t-elle précisé.

Coût des émissions de dioxyde de carbone

« Nous allons devoir tarifier le carbone. Je suis en faveur [d’une tarification], qui est plus facile à contrôler au moyen de certificats d’émission. » Mais même aujourd’hui, a fait remarquer la chancelière, il existe déjà une tarification de facto du CO2 par le biais de la taxe sur les huiles minérales et le mazout.

Santé et vie privée

« Dès lors que je décide de faire de la politique, je sais que je suis une personnalité publique », a affirmé la chancelière, ajoutant qu’elle comprenait que l’on se fasse du souci pour elle. Elle s’est créé des lieux où elle peut se retirer, où elle peut être triste ou joyeuse, et cela est accepté, selon son expérience.
En particulier dans le nord de l’Allemagne, où se trouvent ses racines politiques, ou encore avec les membres de son équipe, elle peut avoir des conversations confidentielles, car les choses qu’elle dit ne sont pas vues comme ayant « une valeur marchande ». 

Prise en charge

Nous essayons de rendre les professions paramédicales plus attrayantes : suppression des frais de formation, regroupement des formations de soins infirmiers et de soins aux personnes âgées, négociations salariales collectives. En outre, les jeunes doivent aussi être convaincus qu’il s’agit de très beaux métiers.
La chancelière n’était pas consciente de l’étendue des problèmes rencontrés dans le domaine des soins intensifs ambulatoires, présentés par la directrice d’un service de soins infirmiers local. Ce sont surtout les soins intensifs qui sont sous-financés. « J’emporte [ce que vous dites] avec moi », a promis la chancelière, ajoutant qu’elle allait veiller à ce que ces informations alimentent le débat politique dès le lendemain.

Pêche

S’étant fait rappeler une photo de sa première campagne électorale en 1990, sur laquelle elle est assise dans une cabane avec les pêcheurs de Lobbe sur l’île de Rügen, Mme Merkel a raconté qu’elle était restée en contact avec les pêcheurs et qu’elle connaissait leurs difficultés : restrictions en matière de filets de pêche, cormorans, manque de filières de commercialisation pour les pêcheurs côtiers. La plupart des restrictions ont été imposées par l’Union européenne, a précisé la chancelière, qui a dit qu’elle aurait aimé obtenir de meilleurs résultats dans ce domaine. Cependant, elle a fait remarquer que la ministre fédérale de l’Agriculture Julia Klöckner avait négocié avec l’UE une permission pour les petits pêcheurs côtiers de continuer à pêcher le cabillaud, qui sera par ailleurs interdit de pêche à partir de 2020.

Logements abordables et accessibles pour les personnes handicapées
Ces considérations doivent « être globalement mieux intégrées à la planification urbaine », selon la chancelière.

Mme Merkel : son avenir, son amour des animaux et ce qu’est pour elle une journée parfaite
« Trente ans de politique, c’est une grosse tranche de vie ». Mme Merkel ne souhaite plus exercer de fonction politique après 2021. Elle aime bien observer les animaux, surtout dans leur environnement naturel : lièvres, cerfs, oiseaux. « Je trouve que la grue est un très bel oiseau », précise-t-elle. Mais elle trouve aussi les crapauds et les chauves-souris intéressants parce qu’ils sont les signes d’un environnement intact.

La journée parfaite ne saurait être planifiée, selon elle. « Je dois toujours être joignable et disponible ; je ne peux pas dire : c’est ma journée parfaite, vous pouvez me rappeler dans 24 heures. » Mais si une telle journée devait se présenter, elle pourrait inclure de : faire la grasse matinée, prendre le petit déjeuner en paix, sortir à l’air frais dans la journée, puis s’entretenir avec son mari ou des amis le soir, aller à l’opéra ou au théâtre, lire un livre...

Qu’espère-t-elle que les livres d’histoire écriront à son sujet ?

« Elle a fait de son mieux. » Rires dans la salle.

Alexandra, une femelle manchot de Humboldt pensionnaire du musée de la mer Ozeaneum de Stralsund, s’est certainement aussi réjouie de la visite de la chancelière, sa marraine. « Elle n’est pas très belle en ce moment. Elle est en pleine mue », a rapporté la chancelière.