« L’Europe doit se tourner vers le monde »

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Discours du chancelier fédéral à Strasbourg « L’Europe doit se tourner vers le monde »

Dans son discours devant le Parlement européen à Strasbourg, le chancelier fédéral Olaf Scholz a clairement fait état de la responsabilité de l’Europe dans le monde : « Nous avons besoin d’une Union européenne géopolitique, d’une Union européenne élargie et réformée et, tout particulièrement, d’une Union européenne ouverte sur l’avenir », selon le chancelier.

Temps de lecture: 7 min.

Le chancelier fédéral Olaf Scholz au Parlement européen à Strasbourg

« L’Europe est notre avenir ! Et l’avenir de l’Europe est entre nos mains », a insisté le chancelier fédéral Olaf Scholz devant le Parlement européen à Strasbourg.

Photo : Gouvernement fédéral/Kugler

Mettre en commun la production de charbon et d’acier afin que plus jamais la guerre ne puisse éclater en Europe : c’est cette proposition, émise il y a 73 ans par Robert Schuman, alors ministre français des Affaires étrangères, que le chancelier a rappelée mardi à Strasbourg. Le charbon et l’acier étaient des biens qui avaient, des décennies durant, servi à la production d’armes. « Le rêve des pères et des mères de l’Europe était de cesser définitivement de s’entretuer », d’après le chancelier fédéral : « Pour nous, ce rêve s’est réalisé. »

Mais il n’est pas devenu réalité dans tous les pays d’Europe : « Au prix de grands sacrifices, la population d’Ukraine défend jour après jour sa liberté et la démocratie, sa souveraineté et son indépendance face à la brutalité de l’armée russe qui l’envahit. » L’Europe en voie d’unification a une mission qui va bien au-delà de la préservation de la pacification à l’intérieur de ses frontières : « L’Europe porte une responsabilité mondiale », selon Olaf Scholz.

Le monde du XXIe siècle sera multipolaire

5 % de la population mondiale vit en Europe à l’heure actuelle. En Asie, en Afrique et en Amérique du Sud, de nouveaux poids lourds économiques, démographiques et politiques voient le jour. Le chancelier en est donc convaincu : « Le monde du XXIe siècle sera multipolaire – il l’est déjà depuis longtemps. »

Afin d’assurer à l’Europe une bonne place dans le monde de demain, « sur un pied d’égalité avec d’autres, et à leurs côtés », l’UE doit changer. « Nous avons besoin d’une Union européenne géopolitique, d’une Union européenne élargie et réformée et, tout particulièrement, d’une Union européenne ouverte sur l’avenir », selon le chancelier.

« L’Union européenne a rarement été plus unie »

L’Europe ne peut se faire entendre que si elle parle d’une seule voix. La guerre d’agression russe contre l’Ukraine a montré par sa brutalité à quel point cette assertion était indéniable. « Et en toute logique, l’Union européenne a rarement été plus unie qu’après cette ignoble violation de l’ordre de paix européen et international », a relevé M. Scholz. C’est sur cette expérience qu’il faut bâtir une Europe géopolitique.

Le chancelier a fait référence aux propositions qu’il avait formulées lors de sa visite à l’Université Charles de Prague.

  • Parmi celles-ci, une imbrication plus étroite de nos efforts de défense et la constitution d’une économie de défense européenne intégrée.
  • Par ailleurs, les jalons de la reconstruction de l’Ukraine doivent être posés dès à présent. Cela exige un capital politique et financier à long terme. Dans le même temps, cela représente selon M. Scholz une grande opportunité, « pas seulement pour l’Ukraine, mais pour l’Europe dans son ensemble. Car une Ukraine prospère, démocratique, européenne, est le net désaveu de la politique impériale, révisionniste et contraire au droit international de Vladimir Poutine sur notre continent. »
  • L’Europe doit également réussir au regard de la concurrence mondiale avec d’autres grandes puissances. Les États-Unis restent en cela ses meilleurs alliés. En investissant davantage dans notre sécurité et notre défense, nous sommes alors d’encore meilleurs alliés. Concernant la Chine, le chancelier et Ursula von der Leyen sont d’accord : « La devise est : non pas le découplage, mais une diminution intelligente des risques. »

Les pays du Sud sont de nouveaux partenaires dont nous prenons au sérieux les inquiétudes et les intérêts légitimes. Il est en outre plus que raisonnable de conclure rapidement de nouveaux accords de libre-échange équitables, avec le MERCOSUR, avec le Mexique, avec l’Inde, l’Indonésie, l’Australie, le Kenya, ainsi qu’avec de nombreux autres pays par la suite. Négocier pendant des années sans résultat conduirait à ce que d’autres dictent les règles à l’avenir, avec des normes environnementales et sociales au rabais. « L’Europe doit se tourner vers le monde », a martelé le chancelier.

Une UE élargie et réformée

« Nous avons pris la décision d’une grande Europe », a affirmé Olaf Scholz, rappelant ce qui avait été dit aux citoyennes et citoyens des pays des Balkans occidentaux, de l’Ukraine, du Moldova et, à terme, de la Géorgie : vous êtes des nôtres. Il ne s’agit pas d’altruisme, mais de « notre crédibilité et de notre raison économique ». Et « d’assurer durablement la paix en Europe après le tournant historique que représente la guerre d’agression menée par la Russie ».

Majorité qualifiée pour la politique étrangère et la fiscalité

Une politique d’élargissement sincère met également en œuvre la promesse faite au voisinage immédiat – c’est aussi à cela, selon le chancelier fédéral, que l’on mesure une Europe géopolitique. Bien sûr, des progrès doivent encore être faits, mais il ne faut pas oublier de les honorer, faute de quoi l’UE perdrait en influence et en rayonnement.

La vérité exige cependant de le dire : « une UE élargie doit être une UE réformée. » À ce sujet, le chancelier a salué expressément le fait que le Parlement européen travaille sur des propositions de réformes institutionnelles. M. Scholz a plaidé pour que davantage de décisions du Conseil de l’UE soient prises à la majorité qualifiée en matière de politique étrangère et de fiscalité. Il a assuré qu’il continuerait à œuvrer pour convaincre sur ce sujet. À ses yeux, ce n’est pas l’unanimité, ni l’adhésion à 100 % à toutes les décisions qui crée la plus grande légitimité démocratique possible, mais « bien le fait de plaider et de se battre pour des majorités et des alliances qui nous distingue en tant que démocrates ».

Respect des principes démocratiques et de l’état de droit

Un autre point indispensable pour l’avenir est de veiller au respect des principes démocratiques et de l’état de droit au sein de l’UE. Le chancelier a proposé d’utiliser la discussion prévue sur les réformes de l’UE pour inciter la Commission européenne à toujours initier une procédure d’infraction en cas de manquements « quand nos valeurs fondamentales sont bafouées, à savoir la liberté, la démocratie, l’égalité, l’état de droit et le respect des droits de l’homme ».

Une UE qui s’ouvre sur l’avenir

Troisième point soulevé par le chancelier : « Nous autres Européennes et Européens devons nous ouvrir sur l’avenir, sans tergiverser. » Il faut pour commencer résoudre les vieux problèmes, tels que le traitement des migrations en lien avec l’exil, par exemple. Le chancelier a instamment plaidé pour que la réforme du régime d’asile européen commun soit parachevée avant les élections européennes.

Tout le monde s’accorde autour de l’objectif de « mieux maîtriser et piloter la migration irrégulière – sans pour autant trahir nos valeurs ». Étant donné le besoin criant de main-d’œuvre dans de nombreuses régions d’Europe, lier les opportunités de migration régulière à l’exigence que les pays d’origine et de transit reprennent les personnes qui ne peuvent prétendre au séjour pourrait profiter à toutes les parties. Associé à une protection efficace des frontières extérieures, comme il en a été décidé au Conseil européen en février, cela permettrait de faire croître l’acceptation d’une immigration intelligente, maîtrisée et contrôlée et de priver de fondement ceux qui font de la politique dominée par la peur et le ressentiment. 

Préparation d’un avenir climatiquement neutre

La « plus grande tâche » reste cependant la « préparation de nos pays, de nos économies et de nos sociétés à un avenir climatiquement neutre ». Il importe que les citoyennes et citoyens de nos pays le ressentent dans leur quotidien, par exemple à travers une baisse du prix de l’électricité issue des énergies renouvelables ou par la création de nouveaux emplois prometteurs dans l’industrie de l’énergie, ou bien dans le secteur des puces.

« Organiser ce changement de façon ambitieuse en ne laissant personne de côté, tel est le grand projet d’avenir derrière lequel nous devons, en tant qu’Européens, nous rassembler », d’après M. Scholz.

En conclusion, le chancelier a appelé à ne pas se laisser intimider par les manifestations de pouvoir de Vladimir Poutine. Les Ukrainiennes et les Ukrainiens payent de leur vie « cette folie de leur puissant voisin ». Olaf Scholz a exhorté « à rester fermes dans notre soutien à l’Ukraine, aussi longtemps que cela sera nécessaire ». Aucun d’entre nous ne désire en effet revenir à l’époque où régnait en Europe la loi du plus fort et où les plus petits pays devaient se soumettre aux plus grands ; où la liberté n’était le privilège que d’une petite minorité, et non un droit fondamental pour tous.

Le chancelier a affirmé sans ambages : « Notre Union européenne, unie dans sa diversité, est la meilleure assurance de ne pas voir revenir ce passé. » L’avenir – « notre avenir – est l’Union européenne ».  

Dans le cadre du cycle de débats « C’est l’Europe », le Parlement européen invite des cheffes et chefs d’État et de gouvernement à présenter leur idée de l’Europe. Dernièrement, le premier ministre luxembourgeois Xavier Bettel s’est exprimé le 19 avril 2023 dans le cadre de ce cycle.