L’espoir de ne pas voir l’histoire se répéter

  • Page d'accueil
  • Le gouvernement fédéral

  • Actualités

  • Service

  • Médiathèque

Souvenir des expériences de fuite et d’expulsion L’espoir de ne pas voir l’histoire se répéter

Le souvenir bien intégré constitue un élément essentiel lorsqu’il s’agit d’aborder les questions concernant la fuite et l’expulsion. C’est ce qu’a affirmé, à Berlin, le ministre fédéral de l’Intérieur Thomas de Maizière lors de la cérémonie commémorative du gouvernement fédéral rendant hommage aux victimes de la fuite et de l’expulsion.

Temps de lecture: 6 min.

Le président roumain Klaus Iohannis s’exprime lors de la cérémonie centrale du gouvernement fédéral pour les victimes de la fuite et de l’expulsion

Son pays a encouragé les minorités allemandes à jouer un rôle actif, selon le président roumain Klaus Iohannis

Photo : BMI/Schacht

C’était la première fois qu’un invité étranger, le président roumain Klaus Iohannis, prononçait un discours dans le cadre de cette cérémonie.

Pour débuter la commémoration, qui se tenait dans le Schlüterhof du Musée de l’histoire allemande, le ministre fédéral de l’Intérieur Thomas de Maizière a rappelé le patrimoine culturel des personnes déplacées en lisant le poème « Nuit sous la lune » de Joseph von Eichendorff. Comme Kant et Herder, Eichendorff a marqué le paysage culturel de la Silésie et de la Prusse orientale. Et c’est cela, finalement, qui fait un pays et ses habitants : les espaces culturels, les paysages, la religion. Le souvenir bien compris constitue en outre un élément essentiel lorsqu’il s’agit d’aborder de manière efficace les questions relatives à la fuite et l’expulsion, a poursuivi M. de Maizière. Car seul celui qui vit la paix peut aussi la transmettre.

Souvenir des camps et du déracinement

M. de Maizière a qualifié de « grand et beau geste » le fait qu’un dignitaire étranger, le président roumain Klaus Werner Iohannis, ait parlé pour la première fois dans le cadre de cette cérémonie commémorative organisée pour la troisième fois en 2017. Dans son discours, M. Iohannis a d’abord rappelé la Seconde Guerre mondiale, qui a vu 30 millions de personnes perdre leur patrie en raison de déportations et d’expulsions.

Les minorités allemandes représentent une part importante des personnes déplacées ; de nombreuses personnes déplacées sont « prisonnières de leur propre mémoire », selon M. Iohannis. Il a cité à cet égard l’excellent roman « La Bascule du souffle » de l’auteure germano-roumaine Herta Müller : « Comment errer de par le monde quand on n’a plus rien à dire de soi, sinon qu’on a faim. »

La politique roumaine en matière de minorités est un modèle pour l’Europe

Le président roumain a rendu hommage aux nombreuses victimes allemandes de déportations vers la Russie. Après la Seconde Guerre mondiale, 70 000 membres de la minorité allemande de Roumanie ont ainsi été déportés en Russie. 10 000 d’entre eux ont perdu la vie. Cette réalité historique est indispensable à une meilleure compréhension « de qui nous sommes et de ce que nous devons faire à l’avenir », a souligné M. Iohannis.

C’est pour cela que la Roumanie s’engage en faveur des minorités allemandes dans le pays, les encourageant à jouer un rôle actif. L’on n’a pas seulement adopté des mesures importantes rendant hommage aux victimes du communisme. Des indemnisations ont également été versées, et des restitutions à large échelle ont été octroyées. La politique roumaine en matière de minorités est ainsi un modèle pour l’Europe, selon M. Iohannis.

Éloge de l’engagement humanitaire de l’Allemagne

« Nous souhaitons que l’histoire ne se répète pas », a affirmé M. Iohannis, même si la réalité est autre. Cependant, les défis actuels ne pourront être maîtrisés « que si nous démontrons que nous avons tiré des leçons de l’histoire ». Dans ce contexte, le président roumain a rappelé les foyers de crise mondiaux tels que la Syrie, la Somalie, le Yémen ou le Nigeria, où des populations sont forcées à fuir leur patrie. Pour les réfugiés, l’Europe est un lieu sûr. Aucun réfugié ne mettrait eu jeu sa vie et celle de sa famille s’il pouvait vivre en sécurité dans son propre pays, a souligné M. Iohannis.
Le président roumain a également parlé de la peur du terrorisme en Europe : « Nous assistons à une montée des nationalismes en Europe », a-t-il dit. C’est pourquoi l’Europe doit protéger ses valeurs telles que la tolérance et la diversité culturelle et faire preuve de solidarité en matière de répartition des réfugiés. M. Iohannis a loué « l’engagement humanitaire extraordinaire de l’Allemagne » dans la crise des réfugiés. Concluant son discours, M. Iohannis a dressé un bilan positif : la journée de commémoration montre que le monde a appris de ses erreurs, a-t-il estimé.

Merci pour la patrie

Ghifar Taher Agha, un réfugié syrien et participant au programme d’intégration par le sport « Integration durch Sport » soutenu par l’Office fédéral des migrations et des réfugiés (BAMF), a ensuite raconté son expérience de la fuite vers l’Allemagne. Son cheminement a duré 10 mois et inclut des événements qu’il ne peut oublier. Il a laissé en Turquie sa femme enceinte et leur fille d’un an et demi pour parvenir dans un premier temps seul en Allemagne.

C’est en mars 2015 que le médecin est arrivé en Allemagne et qu’il a entrepris les premières étapes de l’intégration en Sarre. Sa famille a enfin pu le rejoindre en avril 2016. Ils sont depuis lors « très heureux » dans leur nouvelle patrie. M. Agha a souligné que « la fuite, l’expulsion, l’arrivée puis la patrie » étaient l’espoir de tous les réfugiés. « Merci pour notre arrivée en Allemagne et merci pour cette patrie » était la conclusion de sa prise de parole.

Journée de commémoration pour les victimes de la fuite et de l’expulsion

Le 20 juin est la journée de commémoration des victimes de la fuite et de l’expulsion. Par cette date, le gouvernement fédéral fait écho à la Journée mondiale des réfugiés des Nations Unies et étend cet hommage aux réfugiés au sort des personnes déplacées.

Des témoins d’époque parlent à des écoliers

Le matin, le ministre fédéral de l’Intérieur Thomas de Maizière a rencontré au ministère fédéral de l’Intérieur des élèves du lycée Carl-Bechstein de la ville d’Erkner et de la maison germano-polonaise (Deutsch-Polnisches Haus) de Gliwice. Il s’est entretenu avec les élèves ainsi qu’avec trois témoins d’époque chassés des anciens territoires de l’Est ou de la zone de la Volga à cause de leurs origines allemandes à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les écoliers ont interrogé les témoins sur leur sort d’expulsés. Ils ont ensuite parlé avec eux et M. de Maizière de la signification de cette journée d’hommage sur le plan de la politique du souvenir. Les parallèles et les différences de l’expérience allemande de l’expulsion en conséquence de la Seconde Guerre mondiale avec les actuels mouvements de migration ont également été débattus.

M. de Maizière a souligné que la journée de commémoration des victimes de la fuite et de l’expulsion n’était pas une journée tournée vers le passé d’une génération vieillissante et en train de disparaître. Il appartient bien plus à la culture vivante de la mémoire de la jeune génération. « Une génération épargnée par la guerre et la déportation n’éveillera la volonté et la force d’une Europe réconciliée et de la cohésion au sein d’une société libre que si elle se remémore régulièrement ce que signifient vraiment, de façon historique et actuelle, la fuite et l’expulsion. Rien ne transmet mieux cela que la discussion avec des personnes qui en ont été victimes », selon le ministre.

Fuite et expulsion

La fuite et l’expulsion ont marqué l’histoire de l’Europe au XXe siècle. Le gouvernement fédéral soutient l’assimilation historique ainsi que le souvenir et la commémoration des victimes. Pour les personnes qui les ont vécues, la fuite et l’expulsion sont la plupart du temps synonymes de grande souffrance. 65 millions de personnes sont actuellement en fuite de par le monde, soit près de 10 % de plus qu’en 2016. En attestent les statistiques du dernier rapport annuel du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Les causes sont dues à la guerre, aux conflits et à la persécution. Rapporté à la population mondiale, qui s’élève à environ 7,3 milliards de personnes, cela représente statistiquement une personne sur 113 en demande d’asile, déplacée intérieure ou migrante ; c’est plus que jamais auparavant.