« Nous devons investir dans l’avenir. »

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Visioconférence du Conseil européen « Nous devons investir dans l’avenir. »

La chancelière fédérale Angela Merkel s’est penchée avec les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne sur les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19. « Nous avons besoin, y compris dans l’intérêt de l’Allemagne, d’un plan de relance en Europe », a-t-elle expliqué après la visioconférence du Conseil européen. Il faudra aussi investir dans l’avenir : dans la protection du climat, la mobilité innovante, la numérisation.

Temps de lecture: 10 min.

Visioconférence du Conseil européen

Conférence de presse de la chancelière fédérale Angela Merkel

Photo : Bundesregierung/Steins

Conférence de presse de la chancelière fédérale Angela Merkel

ANGELA MERKEL : Mesdames et Messieurs, nous sortons, comme vous le savez, de la quatrième visioconférence du Conseil européen depuis la flambée de la pandémie de Covid-19. Comme lors de notre dernière réunion, la priorité, très claire, a consisté à définir comment nous pouvons et voulons faire face aux défis de cette pandémie, et ce tous ensemble.

Avant d’entrer dans les détails, je veux souligner deux choses. Nos échanges de ce jour ont été très francs et néanmoins empreints d’un esprit de coopération. Bien entendu, nous ne sommes pas encore du même avis sur tous les points mais nous agissons dans la certitude commune que nous réussirons uniquement si nous faisons front de concert. La pandémie nous touche tous. Telle est notre compréhension commune de la situation.

D’autre part, je veux replacer une nouvelle fois cette réunion dans son contexte général. Début mars, pour ainsi dire à notre première visioconférence, notre attention était entièrement portée sur l’aspect médical, c’est-à-dire sur la lutte contre la pandémie. Mais depuis au moins la visioconférence de fin mars, l’accent est mis sur les répercussions économiques et sur notre réponse européenne commune à celles-ci. À l’époque, nous avions chargé les ministres des Finances de préparer de vastes mesures d’aide et l’Eurogroupe a ensuite ficelé un pacte de solidarité d’un volume de plus de 500 milliards d’euros, peu avant Pâques. Il a différents éléments. Pour rappel : il revient à la Banque européenne d’investissement de soutenir les petites et moyennes entreprises. Les outils du mécanisme européen de stabilité sont disponibles. Taillé sur mesure pour faire face à la pandémie, celui-ci peut désormais être utilisé rapidement. Il y aura aussi un nouveau règlement sur le chômage partiel qui pourra, je l’espère, être adopté dans peu de temps.

Notre objectif, tel que nous l’avons tous formulé aujourd’hui, est que tout cela puisse être mis en œuvre à partir du 1er juin. Et donc que tous les éléments soient réalisés en mai. Il faut par exemple que le Bundestag allemand intervienne lui aussi. Nous pensons que nous aurons ainsi un ensemble d’instruments très important pour pouvoir apporter une aide rapide et efficace.

Ensuite, nous nous sommes essentiellement penchés sur la manière de faire face à la crise économique aiguë, y compris dans la phase de relance, et sur les moyens de retrouver une conjoncture favorable. Nous avons tous dit, sans ambiguïté : il nous faut un plan de relance ou un « recovery fund ». Je veux le dire très clairement : une réponse commune de ce type est aussi dans l’intérêt de l’Allemagne car nous aussi n’irons bien, sur le long terme, que si toute l’Europe va bien. Nous sommes liés à l’ensemble de l’Europe par les chaînes de création de valeur, nous le voyons aujourd’hui. Lorsque ces chaînes de création de valeur sont interrompues, nous rencontrons tous de grandes difficultés.

Des investissements substantiels seront nécessaires. J’ai également indiqué clairement qu’il ne s’agirait pas simplement de continuer comme avant la pandémie, comme si de rien n’était, mais que l’enjeu essentiel sera aussi d’investir dans l’avenir. Autrement dit, c’est intimement lié à ce qui doit être fait en matière de protection du climat, de concepts de mobilité innovants, de numérisation. Il faudra aussi réfléchir à ceci : qu’avons-nous appris de cette crise ? Que devons-nous être en mesure d’accomplir ensemble, au plan stratégique, en Europe ?

Nous nous sommes également demandé – sans d’ailleurs toujours trouver de consensus – s’il doit s’agir de subventions ou de crédits. Comment financer ? Nous étions en tout cas d’accord sur le fait que ce « recovery fund » doit être très étroitement lié aux prochaines perspectives financières à moyen terme comme à celles des sept ans à venir. Oui, il faudra investir vraiment beaucoup plus au début. Mais les choses ne sont pas indépendantes les unes des autres, elles sont liées.

Cela signifie pour l’Allemagne que nous devons aussi prévoir des contributions plus élevées au prochain budget par rapport à ce que nous avions prévu lors des dernières négociations budgétaires. Mais c’est juste et c’est une bonne chose. Cette crise nous a tous frappés mais les États ont été touchés de manière très différente.

La Commission européenne a été de nouveau chargée de deux missions. Premièrement, analyser les secteurs économiques les plus touchés et les leçons à en tirer, y compris pour façonner le « recovery fund ». Deuxièmement, dessiner l’architecture possible de ce fonds de relance en lien avec des perspectives financières à moyen terme – ce que la Commission veut réaliser dès le mois de mai.

Un dernier point : nous avons discuté du sort du sommet des Balkans occidentaux que la présidence croate souhaitait organiser en mai. Nous avons décidé de le réaliser sous forme de visioconférence avec les 27 États membres, les institutions et les six États des Balkans occidentaux.

C’est une petite consolation pour la Croatie. En réalité, la Croatie s’était très bien préparée à sa présidence et nous aurait volontiers accueillis en personne. Ce n’est pas faisable dans l’immédiat mais nous pourrons réaliser cet évènement sous cette forme.

QUESTION : Madame la Chancelière fédérale, au vu des débats agités qui ont précédé le sommet, peut-être pouvez-vous dire à quoi ont ressemblé les fronts ? Est-ce qu’il y a eu un affrontement nord contre sud, pour le dire simplement, ou des pays donateurs contre les pays bénéficiaires ? L’Allemagne a-t-elle dû faire face à des attaques particulières de l’Italie, de l’Espagne et de la France, par exemple ?

ANGELA MERKEL : Non. L’atmosphère a été très bonne, soutenue par la conscience partagée que nous devons décider à l’unanimité et trouver des routes communes. Bien entendu, chacun a présenté les choses de son point de vue. Mais l’échange a été très, très cordial. Il y a aussi eu toute une série de contacts préliminaires avant ce sommet. Je n’emploierais donc pas de termes martiaux de ce genre.

QUESTION : Madame la Chancelière fédérale, vous avez donné une date : le premier programme d’aide doit entrer en vigueur le 1er juin. D’après vous, quels sont les obstacles à passer en Allemagne – le Bundestag doit l’examiner – et dans d’autres pays, comme aux Pays-Bas par exemple, pour que le programme entre en vigueur au 1er juin ?

Et une deuxième question, si je peux me permettre ‑ ‑ ‑

ANGELA MERKEL : Ce serait une première si vous n’en posiez qu’une !

QUESTION : Il y a des spéculations sur la prochaine date de concertation avec les Länder, qui devait, si je me souviens bien, avoir lieu le 30 avril. On imagine que cette date serait repoussée à la fin de la première semaine de mai parce qu’on en saurait davantage, à ce moment-là, sur l’effet des ouvertures en cours sur le nombre de personnes infectées. Ces rumeurs de report sont-elles fondées ? Merci.

ANGELA MERKEL : Nous avions convenu du 30 avril. À cette date, il y aura des choses à discuter. Mais nous ne pouvons constater les effets des décisions sur l’ouverture des magasins que deux semaines après, nous l’avons toujours dit. Les premiers magasins ont ouvert ce lundi. Les derniers ouvriront lundi prochain. Certains Länder ont agi mercredi, d’autres hier, il me semble. Nous pourrons donc en parler le 6 mai. Mais il y aura aussi d’autres questions à discuter. C’est pourquoi je pars du principe qu’il y aura une concertation le 30 avril et une autre encore la semaine suivante.

Nous avons résolu d’assurer ce suivi : quels sont les effets des mesures d’ouverture que nous prenons ? Nous sommes tous d’accord sur le fait que nous ne pouvons le voir qu’au bout de 10 à 14 jours. Le 6 mai est une très bonne date à cet égard.

Concernant l’autre sujet, je ne vois pas en réalité de grands obstacles si la Commission présente très rapidement le règlement SURE sur le chômage partiel. Nous informons continuellement le parlement des différentes étapes. Autrement dit, nous savons où nous en sommes pour le MSE. Ce règlement sera examiné dès lors que la République fédérale d’Allemagne doit donner une garantie à valider par le Bundestag allemand.

QUESTION : Une brève question supplémentaire : après la visioconférence d’aujourd’hui, les « eurobonds » sont-ils du passé ?

À qui avez-vous pensé aujourd’hui au Bundestag lorsque vous avez dit que les Länder avaient été, à votre sens, trop brusques ? Plusieurs ministres-présidents auxquels nous avons posé la question nous ont dit : la Chancelière ne peut pas avoir voulu parler de nous. À qui pensiez-vous donc ?

ANGELA MERKEL : J’ai fait part d’une impression générale.

Concernant votre expression « eurobonds » : il n’est pas possible de mutualiser les dettes, comme je l’ai dit aujourd’hui au Bundestag allemand. Je l’ai répété tel quel durant la visioconférence.

QUESTION : Madame la Chancelière fédérale, j’aimerais revenir à votre discours de ce matin. Vous avez une nouvelle fois appelé à la coopération internationale dans la lutte contre la pandémie. À votre avis, la coopération internationale avec le proche partenaire américain, dont le président a suspendu les paiements à l’OMS, fonctionne-t-elle plutôt bien ou mal ? Avez-vous peur que la propension actuelle à la coopération ne soit pas à la hauteur du défi ?

ANGELA MERKEL : Je crois qu’il y a une prise de conscience. Les téléconférences en format G7, actuellement sous présidence américaine, ou dans le cadre du G20 montrent il me semble que nous savons que c’est une maladie qui nous a tous touchés, une pandémie à laquelle personne, pour ainsi dire, ne peut se soustraire ou que nul ne peut faire mine d’ignorer. Elle nous touche tous. Voilà pourquoi il y a beaucoup de bonnes raisons de coopérer, par exemple pour développer un vaccin, pour approvisionner en respirateurs, pour les médicaments. Nous dépendons les uns des autres.

Les avis divergent sur l’évaluation de l’efficacité de l’OMS. Les États-Unis d’Amérique se sont montrés très critiques. J’ai répété ce matin que nous avons besoin de l’Organisation mondiale pour la Santé, que bien sûr nous devons analyser ses faiblesses lorsqu’il y en a. Comme bien d’autres, j’ai souligné mon adhésion claire et nette à l’Organisation mondiale pour la Santé.

QUESTION : Madame la Chancelière fédérale, j’en reviens aux finances de l’UE. Apparemment, vous avez parlé durant la visioconférence de la nécessité de débloquer mille milliards. Après une intervention particulièrement dramatique de Christine Lagarde, vous auriez dit que le train de mesures devrait être très important. Pourriez-vous expliquer en quelques mots : cette somme se compose-t-elle de ces 500 milliards plus 500 milliards supplémentaires du « plan de relance » ou serait-ce une enveloppe supplémentaire ?

ANGELA MERKEL: Je ne sais pas les échos que vous avez des conférences. Ce billion a souvent été cité par rapport au fait que j’ai dit : il faut naturellement réfléchir aux ordres de grandeur dont on peut avoir besoin pour un plan de relance, voir comment le définir. C’est évident. C’est pourquoi nous avons demandé à la Commission de nous faire des propositions pour évaluer les différents secteurs, c’est-à-dire leur influence ou leurs pertes. Beaucoup d’éléments nous sont encore inconnus. Nous ne savons pas comment va évoluer le secteur du tourisme en Europe ; nous ne savons pas quelle va être l’évolution des achats de voitures après le début de baisse de la pandémie. C’est très difficile de faire des prévisions. Mais tout le monde était d’accord pour dire que nous ne parlons pas de 50 milliards d’euros. J’ai simplement dit que j’aimerais qu’on ne se contente pas de donner un ordre de grandeur mais qu’on le déduise et qu’on l’étaye. C’est aussi l’esprit qui a dominé nos échanges.

Je vous remercie et vous souhaite une bonne soirée !