L’adieu à un grand Européen

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Cérémonie d’hommage à Helmut Kohl L’adieu à un grand Européen

Au cours de la cérémonie d’hommage européen, la chancelière allemande a rendu hommage à un « dirigeant mondial tourné vers les hommes ». Après les célébrations à Strasbourg, l’hommage officiel au défunt s’est poursuivi en Allemagne par un cortège funèbre qui s’est formé à Ludwigshafen, suivi d’un requiem en la cathédrale de Spire.

Temps de lecture: 10 min.

La chancelière fédérale Angela Merkel prononce un discours lors du dernier hommage rendu à Helmut Kohl à Strasbourg

Angela Merkel a remercié l'ancien chancelier Helmut Kohl pour les chances que « nous avons obtenues en tant qu'Allemands et en tant qu'Européens »

Photo : Bundesregierung/Kugler

De nombreux compagnons de route et amis politiques de l’ancien chancelier étaient venus assister à la messe pontificale de requiem dans la cathédrale de Spire. Parmi les invités se trouvaient notamment le président fédéral Frank-Walter Steinmeier, la chancelière fédérale Angela Merkel et le président du Bundestag allemand, Norbert Lammert.

Samedi matin a eu lieu pour la première fois dans l’histoire de l’Union européenne une cérémonie d’hommage européen. Les trois institutions européennes – le Conseil européen, le Parlement européen et la Commission européenne – avaient organisé cette cérémonie à la mémoire d’Helmut Kohl.

Dans son allocution prononcée au Parlement européen de Strasbourg, Angela Merkel a déclaré qu’Helmut Kohl incarnait une époque. « Il fut l’un des bâtisseurs de l’Europe dans laquelle nous vivons aujourd’hui », a-t-elle affirmé, et si l’Europe de l’Est et l’Europe de l’Ouest sont réunies, s’il existe un marché commun, si les contrôles ont disparu aux frontières et si nous possédons une monnaie unique, selon elle, « cela reste lié au nom de Helmut Kohl ».

Angela Merkel : « On pouvait compter sur lui »

Ils sont nombreux à s’être frottés à lui, mais qu’importe à présent, a poursuivi la chancelière. Puis elle a insisté sur ce qui, chez Helmut Kohl, lui en imposait. Il y avait son sens de ce qui était politiquement faisable, mais aussi les convictions inébranlables qui le guidaient. « On pouvait compter sur lui », a-t-elle souligné. Il allait vers les gens. Il recherchait et cultivait le contact étroit. Il suscitait la confiance. « C’était un dirigeant mondial tourné vers les hommes », a-t-elle poursuivi. Il a su jeter des passerelles, tout comme il a réussi, à la fin de son mandat, à ce que l’Allemagne soit réunie et entretienne avec ses voisins des liens fondés sur la paix, la liberté et l’amitié.

Dissipées, les craintes de voir l’Allemagne réunie

C’est Helmut Kohl qui voulait l’unité, alors que d’autres hésitaient encore. Sa profonde conviction européenne et la confiance dont il jouissait dans le monde entier l’ont aidé, de l’avis de Mme Merkel, à dissiper les craintes et les inquiétudes concernant une Allemagne réunie. « Avec ses partenaires, il a ancré l’unité allemande dans la construction européenne. Une œuvre de paix, une œuvre de liberté et une œuvre d’unité », a ajouté la chancelière.

Angela Merkel a rappelé que l’Europe était l’œuvre de générations entières et qu’il appartenait à chacune d’elle de trouver ses propres réponses, ce qui, selon elle, découlait de ce qui caractérisait Helmut Kohl, à savoir « la connaissance de l’Histoire, la clairvoyance, la capacité d’être à l’écoute des autres, et le sens de ce qui est faisable et acceptable ».

Gratitude et humilité

À la fin de son allocution, Angela Merkel a redit encore une fois que sans Helmut Kohl, la vie de ceux qui vivaient jusqu’en 1990 derrière le rideau de fer aurait été complètement différente. « Y compris la mienne, bien sûr », a-t-elle reconnu, avant de poursuivre que si elle était là où elle est aujourd’hui, c’était essentiellement à Helmut Kohl qu’elle le devait. « Merci pour les chances que vous m’avez données, merci pour les chances que vous avez données à beaucoup d’autres. Merci pour les chances qui nous ont été offertes, en tant qu’Allemands et en tant qu’Européens, grâce à vous », a-t-elle déclaré en s’inclinant avec gratitude et humilité devant la dépouille de l’ancien chancelier et devant sa mémoire.

Antonio Tajani : Helmut Kohl était « un homme courageux »

La chancelière allemande fut la dernière à prendre la parole à la cérémonie d’hommage européen à Strasbourg. Le premier à prononcer l’un des huit discours avait été le président du Parlement européen, Antonio Tajani. Il avait rendu hommage à « un homme courageux, un ambassadeur de la liberté et de la démocratie », ajoutant qu’Helmut Kohl avait tendu la main aux jeunes démocraties européennes et que « l’Europe d’Helmut Kohl ne craignait pas d’offrir un avenir, et de le forger. »

Jean-Claude Juncker : Helmut Kohl a su saisir le moment propice

Visiblement ému, le président de la Commission européenne a dit adieu à Helmut Kohl, « un fidèle ami ». « Helmut Kohl était un patriote allemand et européen », a-t-il déclaré. Il n’y avait pour lui aucune contradiction entre ce qui est allemand et ce qui doit être européen. C’est pourquoi il souhaitait des obsèques européennes.

Helmut Kohl a su prendre en marche le train de l’Histoire. « Il a su saisir le moment propice là où d’autres auraient échoué. » Outre de nombreux autres mérites, Helmut Kohl avait également le regard tourné vers l’Est et vers l’Europe centrale. « Il était toujours conscient de sa responsabilité historique envers la Pologne, tout comme l’était Willy Brandt. » Jean-Claude Juncker a évoqué avec émotion un moment où il a vu Helmut Kohl pleurer. C’était le 13 décembre 1997, lorsque le Conseil européen décida d’engager des négociations d’élargissement avec les pays d’Europe orientale, Malte et Chypre. L’un des plus beaux moments de sa vie, a reconnu le président de la Commission européenne. «

Quand le silence s’est fait, ses larmes ont coulé. Pas seulement les siennes, d’ailleurs », se souvient encore Jean-Claude Juncker.

Helmut Kohl avait le même respect pour tous les États membres : les grands et les petits pays se sentaient compris. Jean-Claude Juncker s’est remémoré comment Helmut Kohl et François Mitterrand se sont pris par la main à Verdun : « Ce jour-là, ils ont scellé à tout jamais la fraternité entre l’Allemagne et la France », a-t-il dit en s’inclinant devant l’« immense héritage » du défunt.

Donald Tusk : Helmut Kohl était un précurseur de l’unification européenne

Le président du Conseil européen Donald Tusk a, lui aussi, rendu hommage à Helmut Kohl, un précurseur de l’unification européenne à ses yeux. « Sa vision dépassait les frontières de l’Allemagne et les intérêts de son pays. » Helmut Kohl a rendu par ailleurs de grands services au travail de réconciliation avec la Pologne. Il a compris que « les premiers à déchirer le mur de Berlin avaient été les ouvriers des chantiers navals de Gdansk ».

L'ancien président américain Bill Clinton fait ses adieux à Helmut Kohl lors de la cérémonie d'hommage à Strasbourg

L'adieu de Bill Clinton : Tu as bien réussi ta vie. Et nous qui avons pu en faire partie, nous t'aimons pour cela.

Photo : Bundesregierung/Kugler

« Je l’aimais »

Comme le souhaitait la veuve d’Helmut Kohl, plusieurs personnalités ont ensuite pris la parole à titre personnel : l’ancien premier ministre espagnol Felipe González, l’ancien président américain Bill Clinton et le premier ministre russe Dmitri Medvedev. Felipe González a dit d’Helmut Kohl qu’il était « le fer de lance de la construction européenne ». Il a ajouté avoir l’impression de perdre un ami avec lequel il avait partagé des heures historiques.

Bill Clinton a dit au sujet de l’ancien chancelier : « je l’aimais ». Helmut Kohl appelait de ses vœux un monde dans lequel la coopération « valait mieux que le conflit ». Il voulait créer un monde dans lequel nul ne dominerait personne. » Tout au long de sa carrière politique, l’ancien chancelier fédéral a été appelé à répondre à de grandes questions qui auraient des ramifications jusque dans le temps présent, et ce sont précisément ses réponses qui ont incité les représentants de tant de pays à participer à l’hommage d’aujourd’hui, a-t-il constaté.

Le premier ministre russe Dmitri Medvedev a rappelé la relation étroite qu’Helmut Kohl entretenait avec la Russie. Pour l’ancien chancelier, la Russie était membre à part entière d’une Europe unie. « Pour lui, c’était une partie d’une maison commune, sans barbelés. C’était un rêve de paix et de sécurité pour tous. » Helmut Kohl, a ajouté Dmitri Medvedev, était une personne d’avenir. « Et ce fut aussi l’architecte du monde actuel ».

Emmanuel Macron : « Helmut Kohl nous tendit la main »

Le président français a rendu hommage à Helmut Kohl qui fut pour la France plus qu’un ami. « Helmut Kohl nous tendit la main », a déclaré Emmanuel Macron. Le président français a rappelé le rapprochement des deux pays dans les années 80 ainsi que le lien étroit entre Helmut Kohl et l’ancien président François Mitterrand. « Pour ma génération, Helmut Kohl c’est déjà une part de l’histoire européenne. » Emmanuel Macron a affirmé sa volonté de coopérer étroitement avec Angela Merkel. Et il a conclu en allemand : « Wir haben heute überhaupt keinen Anlass zur Resignation. Wir haben vielmehr Grund zu realistischem Optimismus. » (Nous n’avons aucune raison de nous résigner, mais toutes les raisons d’être des optimistes réalistes).

Cortège funèbre à Ludwigshafen et à Spire

Après la cérémonie d’hommage européen à Strasbourg, les célébrations se sont poursuivies en Allemagne dans l’après-midi et la soirée de samedi.
La dépouille d’Helmut Kohl a rejoint l’Allemagne en hélicoptère, puis le cortège funèbre a traversé le centre-ville de Ludwigshafen pour que la population puisse dire adieu à l’ancien chancelier, avant de descendre le Rhin jusqu’à Spire, à bord du navire militaire MS Mainz convoyé par d’autres bateaux.

Requiem en la cathédrale de Spire

Une messe funèbre a été célébrée dans la cathédrale de Spire. De nombreux compagnons de route et amis politiques d’Helmut Kohl y assistaient. Parmi les invités se trouvaient également Frank-Walter Steinmeier, Angela Merkel et Norbert Lammert. Un écran géant placé dans le jardin de la cathédrale (Domgarten) a permis au public de suivre le service funèbre célébré par l’évêque Karl-Heinz Wiesemann. Le président de la Conférence épiscopale allemande, le cardinal Reinhard Marx, était l’un des concélébrants. L’encadrement musical avait été confié au chœur de la cathédrale de Spire, à l’organiste de la cathédrale et à l’orchestre philharmonique de Rhénanie-Palatinat. Placé devant le maître-hôtel, le cercueil était recouvert du drapeau allemand.

La chancelière fédérale Angela Merkel, le président fédéral Frank-Walter Steinmeier et Andreas Voßkuhle, président de la Cour constitutionnelle fédérale, rendent un dernier hommage à l'ancien chancelier Helmut Kohl à la cathédrale de Spire

Après le requiem pontifical, l'ancien chancelier sera inhumé dans l'intimité

Photo : Bundesregierung/Steins

L’évêque Wiesemann a souligné « l’importance majeure » des services rendus par Helmut Kohl à l’Allemagne, à l’Europe, à la réconciliation et à la paix. Il a qualifié Helmut Kohl de « vrai grand homme d’État qui aimait son Palatinat natal et sa patrie, l’Allemagne ». Le magnifique cadeau de l’Unité allemande restera à jamais associé à son nom, a-t-il estimé, ajoutant que pour Helmut Kohl, être patriote et être européen, cela représentait les deux faces d’une même médaille.
Il a également rappelé combien Helmut Kohl était attaché à la cathédrale de Spire. L’ancien chancelier appelait la cathédrale « son église » et il y a fait venir, en tant que chancelier, de nombreuses personnalités officielles. L’évêque a retracé des étapes de la vie de l’ancien chancelier en évoquant l’importance de sa foi catholique pour son œuvre.

Après la messe, le cercueil a remonté la nef centrale au son du glas jusque sur le parvis de la cathédrale.

Escorte d’honneur militaire et veillée funèbre

Une grande escorte d’honneur militaire constituée de soldats du bataillon de garde et de la Musique des Forces armées fédérale l’a accueilli sur la place devant la cathédrale. Trois compagnies, respectivement de l’armée de terre, de l’armée de l’air et de la marine, étaient présentes aux obsèques. Huit généraux et amiraux ont assuré la veillée funèbre à Spire.

Ce cérémonial de la Bundeswehr est réservé aux soldats ou aux civils ayant accédé à un rang spécial, pour les soldats au moins un grade de général commandant. La dernière « grande escorte d’honneur militaire » fut constituée pour l’ex-chancelier Helmut Schmidt.

Le bataillon de garde du ministère fédéral de la Défense, la « garde », est le plus vieux bataillon de la Bundeswehr. Il a eu 60 ans le 15 février 2017. Ce bataillon compte en tout à peu près un millier de soldats et il effectue en moyenne environ 600 missions protocolaires par an. Les trois « compagnies d’honneur » présentes aux obsèques étaient équipées de « carabines 98k », des armes qui ne tirent pas mais ont uniquement une fonction de représentation.

Après la fin de l’escorte d’honneur, le défunt a été inhumé en présence de sa famille et de ses amis proches au cimetière du chapitre de la cathédrale dans le parc Adenauer de Spire.

Il est possible pour tous de déposer des fleurs et couronnes à deux endroits : au pied de la fontaine située dans la partie basse du jardin de la cathédrale sur le chemin entre la place des foires-expositions et le sud du jardin, ainsi qu’à l’entrée principale du parc Adenauer, rue de la gare.